Michel Mallard  

Utopia #2, The Resort 

Utopia #2

À propos de l'artiste

Il y a un fil rouge qui relie les vies artistiques parallèles de Michel Mallard -graphiste, directeur de création, photographe et curator- et il trouve son départ de l'autre côté de l'Atlantique, au Mexique, plus précisément à México. C'est dans cette terre, où la culture populaire essaime des ready made à chaque coin de rue, qu'il grandit et construit sa grammaire visuelle, forcément imprégnée d'une poésie du décalage. "Ambassadeur" de la Lomographic Society dans les années 1990, il photographie les manifestations de cette poésie latente du quotidien : un câble électrique noué et dessinant le symbole de l'infini, un drapeau américain fièrement hissé, à l'envers… C'est cette même sensibilité qui mène ses pas sur le chemin de ces vaisseaux d'un autre monde.

Rencontre

D’où viennent ces objets étranges posés en pleine campagne ?
Cette série d'images est le résultat d'une rencontre fortuite faite dans le nord de Taïwan : un ensemble de bungalows futuristes laissés à l’abandon. L'image qui présente un plan large reproduit une des premières visions que j'ai eue des lieux : des bulbes très lointains, aux couleurs vives et encore couverts d'une fine pellicule d'eau qui les faisait scintiller sous cette lumière jaune d'après la pluie... Une vision irréelle, dans un pays dans lequel je venais moi-même d'atterrir. Les voisins de cet étrange ensemble architectural s’amusaient de mon intérêt pour cet endroit, cela faisait plus de vingt ans qu’ils vivaient à côté de cette grande ruine moderne, un ensemble hôtelier, entre centre de vacances et parc d’attractions, qui n’a finalement jamais ouvert ses portes.

Cette série d’images a été faite sur deux ans, elle est le résultat de plusieurs voyages. Où vous ont mené ces prises de vue successives ?
J’ai d’abord travaillé sur les extérieurs des immeubles, pour faire des « establishing shots », c’est-à-dire des images qui plantent le décor, posent le contexte général puis je me suis centré sur les formes elles-mêmes et enfin les intérieurs. À chaque séance dans les lieux, je découvrais de nouvelles choses. Le climat tropical de Taïwan fait que la vie y est toujours très palpable, et c’est peut-être d’autant plus probant dans ce lieu à l’abandon. D’une visite à l’autre, tout changeait : la végétation, tantôt toute jaune, puis toute verte en l’espace de quelques jours, les insectes et puis ces objets – des morceaux de statues de singes qui ornaient les toits et le toboggan de la piscine – qui apparaissaient et disparaissaient... Comme si le lieu était hanté de présences fantomatiques. Et ce n’était pas loin de ça : dans certains bungalows, j’ai découvert des matelas, de vieux habits et des journaux et puis une pièce entièrement aménagée comme un appartement, à la différence qu’il n’y a dans ces « appartements » ni arrivée d’eau ni électricité, ni même de vitres recouvrant les fenêtres. Et puis, 6 mois après, la commode, le lit, les papiers, tout avait disparu. Une autre fois encore, alors que j’avais la tête sous le voile noir de l’appareil, j’ai entendu des pas et des murmures, quand j’ai sorti la tête, il n’y avait que les buissons qui bougeaient, c’étaient des jeunes en camouflage qui se servaient du lieu comme champ de bataille et s’échangeaient des balles de plastique… J’avais beau avoir fait le tour des lieux encore et encore, je ne savais jamais ce que j’allais y découvrir !

Qu’est-ce qui vous fascine dans ces ruines modernes ?
Je crois que ce qui m’a attiré ici d’emblée c’était cette architecture, assez proche des constructions utopistes des années 1960 - j’ai moi-même grandi dans une maison composée d’alvéoles et de bulbes. Ces bungalows ont été construits dans la même tendance architecturale mais l’entrée est une grande porte cochère ornée d’un gigantesque dragon et il y avait apparemment des sculptures d’animaux fantastiques un peu partout. Un ensemble un peu « fusion » finalement !
Et puis je trouve fascinant de trouver ces ruines à Taïwan, pays d’où sort – ou du moins sortait pendant très longtemps – la majeure partie des objets que nous consommons largement en Occident, pays qui est à la pointe de la haute technologie. Et ce contraste se ressent non seulement à l’échelle du pays mais aussi sur le site même. Les bungalows sont implantés entre une zone de grandes tours de logements contemporains et la plage, où de vieilles paysannes taïwanaises, habillées de façon extraordinaire, viennent ramasser des crabes dans les rochers en contrebas de ces ovnis.
Il y a une poésie de l’abandon qui vous atteint directement dans ce lieu, ça devient un lieu de sensations, de couleurs, de bruits, de textures, vous avez tout le champ libre pour les explorer.

Vous travaillez la plupart du temps, que ce soit en portrait ou en architecture, à la chambre (grand format), qu’aimez-vous dans la pratique de ce format ?

J'aime bien travailler le portrait et l'architecture à la chambre pour la grande qualité de l'image, sa définition, pour le redressement des perspectives, mais avant tout pour le rythme et le temps de préparation que la chambre impose, la distance que cela crée face au sujet et qui se ressent dans le soin et la précision apportés à la composition. Une sorte de solennité dans le processus et le résultat, que j’aime.

Édition limitée, numérotée et signée par l’artiste. 

Expositions et prix

Michel Mallard Studio, Case Studies, Centro, México, 2011
Art Director's Cut, La Force de L'Art, Grand Palais, Paris, 2006
Art Director's Cut, La Force de L'Art, La Chaufferie, Strasbourg, 2005

Publications

Art Director's Cut, La Force de L'Art, La Chaufferie, Strasbourg, 2005


Portrait : Sophie Dubosc

Informations

& commande

Michel Mallard  
Utopia #2, The Resort

2005-2007

Informations techniques

Tirage argento-numérique Lambda sur papier satiné - édition limitée, certificat numéroté et signé par l'artiste.

Dimensions

38 x 30 cm, Édition de 100 200.00 €




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ART LIGUE pour le "Bon Marché", Paris