Michel Séméniako 

Plage d'Aguda, Porto 

Plage d'Aguda

À propos de l'artiste

La photographie de Michel Séméniako a d'abord été histoire de noir et blanc, prise de jour. Il cadrait serré et s'intéressait à la calligraphie tracée par l'érosion dans les roches, dans une manière proche de l'école américaine de paysages, de Callahan et de Weston. Puis, au hasard de promenades nocturnes en montagne, il découvre l'expressivité du paysage la nuit, éclairé ponctuellement avec la lampe torche. Michel Séméniako voyage beaucoup, part en Inde, en Afrique et y photographie les lieux sacrés dont il redessine - lors de la prise de vue et au moyen de faisceaux lumineux -, les contours de l'environnement architectural et naturel. Puis dans les années quatre vingt-dix, il vient à la couleur et cette fois "peint" le paysage avec des torches colorées ; à la manière expressionniste, les troncs se révèlent pourpres, les branches d'un jaune éclatant et les herbes bleues. Michel Séméniako est un artiste "chaman" : homme invisible devant l'objectif, il évolue en constant mouvement dans le cadre de l'image et met au jour, le temps de la prise de vue, une nature rêvée et vibrante.Il propose de se ré-approprier notre environnement : là où la marchandisation croissante du territoire laisse des cicatrices béantes et pérennes, l'artiste caresse le paysage de touches colorées, dans une manière sensible, aussi poétique qu'éphémère. 

Rencontre

Comment êtes-vous venu à photographier exclusivement de nuit ?
L' idée de photographier la nuit est venue tout à fait fortuitement. Cela s'est fait du côté d'Annecy, sur une montagne que je connaissais enfant, où la nature a fait un très beau travail d'érosion. Je me suis mis à travailler sur ce plateau rocheux, je l'ai vécu comme une sorte de retraite monacale, c'était le retour au désert : j'ai planté ma tente, et je suis resté plus d'un mois à faire ces prises de vues. Au bout de quelques jours, j'avais épuisé la réserve de littérature que j'avais emmené, les soirées étaient un peu longues, je me suis mis à me balader avec une lampe de poche. Et là j'ai vu que tout ce que je photographiais de jour, je pouvais le revisiter de nuit sans avoir la dépendance de cette lumière solaire que je recherchais, que j'attendais, pour avoir les ombres désirées. C'est comme ça que j'ai fait les premières photos de nuit, avec pour seul outil, la lampe de camping, puisque je n'avais prévu aucun matériel pour cela. Il n'y avait aucune intentionnalité initiale, mais plutôt l'émerveillement et la stupeur de découvrir ces possibles. Ce qui m'a encouragé à continuer au fil des années, a été le fait de réaliser que je pouvais re-photographier tout ce qui avait été photographié jusqu'à maintenant, toutes choses sur lesquelles les photographes se répétaient et s'épuisaient, et en faire une chose neuve.

Longtemps vos photographies de nuit étaient en noir et blanc, puis vous êtes passé à la couleur, celle-ci devenant votre matière première. Pourquoi ce passage ? A-t-il changé votre rapport au paysage ?

Dans mes photographies de nuit en noir et blanc, mon geste était très visible, je dessinais avec la lampe, les traits étaient très marqués. Et j'ai ressenti le besoin de donner plus de place à l'espace, à la profondeur, et ce désir appelait la couleur et des interventions beaucoup moins ponctuelles du tracé lumineux. La couleur me permettait ce travail d'interprétation du paysage. Le passage du noir et blanc à la couleur a été dans ma pratique, celui du dessin à la peinture. Ma manière s'inscrit en quelque sorte dans la tradition de la peinture : les peintres de la Renaissance utilisaient un fond monochrome, la grisaille, je travaille de même avec un fond, qui est l'obscurité de la nuit. Sur cette base neutre, j'amène les éléments, en transparence, couleur par couleur, avec ma palette de gélatines et mes "pinceaux torches".

Comment procédez-vous lors de vos prises de vue ?

Je fais un repérage de jour, je prépare mon cadrage, avec le même boitier, la même focale. J'examine mon image de repérage et, avant la prise de vue, je décide des couleurs que je vais utiliser. Je dispose d'une palette double, disons triple, constituée de gélatines, des films transparents que j'appose sur mes torches, provenant du monde du théâtre, du cinéma, et du quotidien (tous les papiers de bonbons, de protège cahiers etc). Très peu de choses se décident pendant la prise de vue.

Avez-vous une équipe pour vous accompagner ?
Il est toujours préférable d'être deux. À Marcoussis, où j'ai réalisé une résidence d'artiste - une des 2 photographies sélectionnées en est issue - j'ai demandé à ce que les habitants intéressés puissent participer aux prises de vues : il y avait parfois dix, quinze personnes autour de moi. Je demande aux gens d'appuyer sur le déclencheur, les consulte sur un effet que je suis en train de créer, par exemple un contrejour, dont je ne peux voir le résultat puisque je suis dans la scène. Je suis toujours dans l'image, jamais en dehors du cadre, je me balade dedans, en mouvement constant, pour que mon fantôme n'apparaisse pas à l'image. Le jeu est intéressant, d'être toujours dans l'image, ça a un petit côté chamanique ! Ce rituel avec la lumière, cette gestuelle induit un rapport à une certaine spiritualité et donc toute photo faite avec cette technique s'inscrit dans cette spiritualité disons, laïque.

Vous avez photographié l'urbain mais c'est la nature qui occupe la majeure partie de votre travail. Ici aussi, c'est elle que vous retrouvez.
L'urbain présente une difficulté qu'il faut contourner, c'est la lumière ambiante. Elle est en concurrence avec ce que je fais, il a fallu que je trouve des solutions techniques, afin que la puissance de ma lampe parvienne à contrebalancer celle de l'éclairage public. L'utilisation du numérique me permet, par des systèmes de double exposition, d'éliminer plus facilement l'éclairage d'ambiance pour ne garder que mon intervention lumineuse. Ce sont des états de nature qui sont photographiés dans ces images.

Pour évoquer ces paysages, vous utilisez parfois le mot "scène"...

Quand je fais une image, je pense à cette condensation qu'il peut y avoir dans l'ouverture d'un opéra, tant dans la musique que dans la scénographie, le décor. L'ouverture ne doit pas dévoiler les clés de l'action mais doit déjà nous plonger dans ses mystères et nous en suggérer le climat. A la fois, il y a tout sans que rien ne soit donné.

Édition limitée, numérotée et signée par l’artiste.

Expositions et prix

Nuits chromatiques, chapelle Saint-Cyprien, Corbeil, 2015
Noche chromaticas, galeria del CEART, Querétaro, Mexique, 2014
Exil et Lucioles, galerie Le Mgasin de Jouets, Arles, 2014
L'esprit des lieux, galerie Le Magasin de Jouets, Arles, 2014
Rivages, festival Photodemer, Vannes, 2014
Interceptions de purs rayonnements, Galerie Immix, 2014
Nuits chromatiques, Musée des moulages de l'Université de Lyon 2, 2012
Las Luces de la Noche, Festival International de l'image, Hidalgo, Mexique, 2012
Nocturnes, Galerie de l'Etrave de l'espace Maurice Novarina, Thonon les Bains, 2012
Nuits chromatiques, Galerie La Chambre Claire, Annecy, 2011
Lettres d'amour des mouches à feu, Domaine de Chaumont sur Loire, 2008
Incandescence, Galerie Alexandre Cadain, Paris, 2008
Human Landscapes, Galerie Le Feuvre, Paris, 2008

Publications

Marcoussis, nuits chromatiques, catalogue, 2011
Human Landscapes, Galerie Le Feuvre, 2008
Les couleurs du Vimeu, Diaphane Editions, 2008
Derrière le rideau de pluie, Editions Thierry Magnier, 2007
Exil, Transphotographic Press, 2004
Dieux de la nuit, Marval, 1992
Lapiaz : anatomie d'un paysage, Passage, 1982

Informations

& commande

Michel Séméniako 
Plage d'Aguda, Porto

2012

Informations techniques

Tirage fine art sur papier Hahnemühle Photo Rag Ultra Smooth - édition limitée, certificat numéroté et signé par l'artiste. Encadrement sur demande.

Dimensions

58 x 90 cm, Édition de 5 2200.00 €
80 x 120 cm, Édition de 5 2500.00 €




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